Témoignage d’Isabelle – 40ème anniversaire

30 juin 2011

Coucou, c’est moi Isabelle une ancienne du Refuge de 1974 a 1976, je vais vous raconter mon week-end à St Quentin en Yvelines pour retrouver des anciennes soeurs.

Que d’émotions de revoir les filles 35 ans après. Ensemble on s’est remémoré les bêtises que l’on faisaient. C’était pas triste. J’ai revu ma maman de coeur (Soeur Jo) qui n’a pas changé et qui a une meilleure mémoire que moi. Elle se rappelle de toutes ses filles et aussi des bêtises que l’on faisait. Elle nous a rapporté des carambars, c’est vrai qu’avant on les croquait à pleine dents, maintenant on les suce lol… tout était super.

Merçi à l’Association des 3A pour ce bon repas, tout était parfait.

Si c’était à refaire, je le referais sans problème, merci mille fois pour ce bon week-end innoubliable bizzzzz

Isabelle

Témoignage d’Anabela – 40ème anniversaire

30 juin 2011

Le 21 mai journée pleine d’émotions. Se retrouver après 35 ans, beaucoup de questions dans la tête avant le jour « j », ce que l’on est devenues les émotions que l’on allait ressentir en se voyant etc.

En arrivant au parc, un noeud au ventre mon regard cherchait des visages correspondant aux souvenirs dans ma tête et très vite nous nous sommes vues et nos souvenirs en commun des moments du passé surgissaient chacune parlait des siens et cela s’enchaînait, alors des liens et les émotions ont surgi dans nos coeurs, oui on avait vécu une periode de notre vie ensemble au même endroit, comme une famille et Soeur Jo était un peu notre (Maman) à toutes, le Refuge a été notre foyer un temps.

Dommage que l’on n’ait pas été plus à être présentes, nous espérons garder le contact et ne pas rester tant d’années sans se voir, un peu déçue de n’avoir vu aucune photos de nous c’était comme si on n’avait pas existé mais à part ça superbe moment.

Merci à l’Association des 3A pour cette journée, nous avons eu la chance de déguster un petit repas Africain (super bon) l’idée du parc était très bonne et en plus la météo était avec nous.

Merci à Sylvie aussi et à tous les autres.

Anabela

A quoi ça sert, une fugue ?

29 septembre 2010

A quoi ça sert, une fugue ?

Je devais avoir quatorze ans peut-être (ma mémoire me fait un peu défaut, enfin cela remonte vers 1963/64…).

Journée d’automne, pluie et vent, climat pourri. Mauvaise journée qui démarre mal, je la sens pas, je m’engueule avec une grande partie de l’équipe. Je suis un incompris et l’injustice n’est pas loin.

Il faut que j’attire l’attention sur MOI. C’est décidé une bonne fugue devrait occasionner une forte mobilisation de Saint Lambert. Un ciré sur le dos, il est 12 heures, j’attaque par le fond de la propriété, but me faire récupérer rapidement car mon absence va être remarquée rapidement (ne suis-je pas un personnage important, un VIP ?). Je marche sous la pluie, je ne croise pas âme qui vive, aucun secours à ma recherche. C’est désolant, je suis trempé, il est 19 heures.

Demi-tour, je rentre. Saint Lambert continue de vivre sans moi et personne n’a rien remarqué, je passe à table (à l’époque il n’existait que le château comme unité de vie). Pas de remarque, pas d’allusion (bien qu’un petit sourire soit au coin des lèvres de Serge L) la vie continue et elle est BELLE.

Denis Parette, 16 janvier 2007

La Planque et Dédicace Inavouable

29 septembre 2010

par Carmen Larivière, ancienne du Refuge, aujourd’hui l’Oustal

La Planque :

Je me souviens c’était en 1978, une fille de l’Oustal Catherine M. s’était faite renvoyée par le Directeur. Elle devait donc retourner à Argenteuil vivre auprès de sa grand mère qui l’avait élevée. Cette solution ne lui convenait pas pour des raisons qui lui appartenaient, de plus son petit copain habitait à deux pas de l’Oustal.

….

Dédicace inavouable :

En avril 1980 je revenais de fugue avec Brigitte. Les camps étaient tous pleins et organisés ; Il n’y avait absolument plus de place et nous ne devions pas restées au Pavillon pendant les vacances scolaires. Les éducateurs nous trouvent à Brigitte et moi un camp dans une association privée. Comme beaucoup de jeunes nous y allons avec du recul car nous ne voulions pas dire que nous venions d’un foyer et l’on craignait que cela se sache.

Témoignage d’Alissata

29 septembre 2010

Le témoignage d’Alissata, ancienne de la Passerelle et du Vieux Logis

Je suis arrivée en France en février 2002 à l’âge de 15 ans. C’est une dame française qui a proposé à ma tante de m’amener chez elle pour m’occuper de sa petite fille et de moi également.

Pendant 2 ans ce fut l’enfer, je n’avais pas le droit de sortir, je devais tout faire dans la maison, j’étais battue, j’étais continuellement maltraitée. Un jour je n’en pouvais plus, c’était trop je suis allée au commissariat. La police a arrêté la personne qui a été condamnée , elle m’a placée au foyer de Brétigny, pendant 6 mois puis je suis allée dans une famille d’accueil, c’était un couple de personnes âgées des gens très gentils. Il y avait 2 autres jeunes.

Après je suis allée au foyer la passerelle, 2mois à Etampes, un an et demi à marolles. A 18 ans je suis allée dans un studio à Montgeron jusqu’à mes 21 ans ; c’est florence qui m’a dit, viens aux 3A,
Dans le studio, je découvrais un peu la vie, je voyais l’éducateur 2 fois par semaine, c’était le début de l’autonomie. Une semaine sur 2 j’allais voir la psychologue. J’ai fait un stage en crèche pour voir quel métier faire, j’ai été embauchée sur un CDD., j’y suis toujours ; il est question d’un CDI..

La passerelle s’était occupée de tous mes papiers, car je n’avais rien. J’ai demandé à être naturalisée. Sans papiers j’avais peur de faire des bêtises.
Je suis très fière de moi car j’avais des doutes sur mes possibilités. D’autres jeunes aimeraient être à ma place.
Parfois je déprimais, car je ne connaissais personne. Je voyais les autres aller dans leur famille et moi j’étais dans ce pays étranger. J’avais tellement souffert, je n’arrivais pas à dormir, j’étais inquiète…. Pour le W.E. et les vacances, j’avais un éducateur pour moi toute seule…..ça c’était bien.
Mes parents sont morts j’avais 2 ans. J’ai 5 frères et sœurs à Ouaguadougou.
Je suis seule en France…. Je suis trop contente d’avoir réussi, j’ai acquis de la maturité, je suis motivée pour continuer, mes employeurs sont supers. Je suis trop contente.

La transmission :
Je voudrais dire aux jeunes, mettez de l’argent de côté. Il faut de l’argent pour vivre, pour payer le loyer. Et puis il faut du respect. Du respect ?
Oui du respect au niveau des éducateurs, et puis entre eux. Mais surtout avec les éducateurs. Je leur ai manqué de respect j’étais insolente, je ne voulais pas me mélanger aux autres. Ce serait bien aussi de parler de la contraception, du planning familial, on en parlait quand on pouvait aller faire le test à la gare
Alissata

Du garçon manqué que j’étais avant à la femme mature que je suis maintenant….

29 septembre 2010

Du garçon manqué que j’étais avant, à la femme nature que je suis maintenant…..

Lorsque je suis arrivée à espace ado., je n’étais pas stable psychologiquement, je suis passée de famille relais en famille relais, elles m’ont beaucoup apporté, enfin certaines. Nous avons fait des démarches administratives, pour que j’ai des papiers.

Le directeur a été très patient. Il m’a orientée vers le vieux logis.
Au vieux logis, ils m’ont donné un bon « coup de pouce » ; J’avais obligation de voir le psychiatre, psychologiquement c’était difficile pour moi, car il n’est pas évident de parler de ce que l’on a vécu, c’était très violent.

A espace ado. J’ai eu une famille en or. On est resté en contact, j’étais anorexique. Avec leurs conseils et leur patience, j’ai pu réapprendre à manger, à vivre, c’est grâce à elle.

Au vieux logis, j’ai bénéficié d’un contrat jeune majeur, c’est l’autonomie. On est toute contente. Quelle émotion de découvrir l’appartement, un presque chez moi. Je me suis dit est-ce que je dois laisser mes affaires dans la valise ?
Etre chez moi, c’est quelque chose que je recherchais car j’aime vivre seule. Là j’ai commencé à changer, à devenir quelqu’un d’autre. J’ai quitté petit à petit le garçon que j’étais pour devenir une femme.

La transmission :
Il faut décoder, cela peut être transmettre un savoir faire, ça peut être une idée de mère à fille…
J’ai envie de transmettre mes expériences, ce que j’ai vécu, les erreurs que j’ai commises pour que les autres ne les fassent pas. Ce n’est pas gagné. Pour capter leur attention il faut de l’insistance, vers la fin de nos rencontres dans le cadre du groupe d’expression, les jeunes du foyer se projetaient un peu, ils venaient après pour parler. J’aurais voulu aller plus les voir dans les groupes. Il faut insister.

flo

Quand je serai grand. Je veux être…

25 septembre 2010

Quand je serai grand. Je veux être…

Dessinateur ! C’était la voie que je m’étais tracé des mes cours de catéchisme à l’âge de 9 ans. J’en ai pris pour 5 ans. A faire des bulles avec Jésus et des pastiches post-soixantuitard en 1971. Un petit démon en puissance qui faisait les 400 coups à sa môman. Le père m’a expédié illico-presto dans un Institut de rééducation à Dammartin sur Tigeaux (77). Bon débarras ! Deux ans plus tard me voilà devant un adulte pour l’orientation professionnelle.

« Moi, quand je serais grand. Je veux être dessinateur.

– Philippe ! Ça ne va pas être possible ! » me répondit-il.
« Dessinateur c’est un métier où il n’y a pas de débouché. Il faut que tu en choisisses un autre.
– Ah bon ! »
Plombier ! Cuisto ! Pompier dans une autre vie… Cow-Boy à cause des Mystères de l’Ouest. L’adulte m’encourage :
« – Oui ! C’est pour ton avenir, Philippe. »
Une étincelle éclaire mon visage souriant par nature :
« Electricien !
– Ça c’est un métier. »

Trois jours auparavant, un électricien était venu farfouiller dans le compteur électrique du château où nous logions.

Septembre 1975, me voilà parachuté à Saint-Lambert des Bois, avec toujours mes feutres et des feuilles pour dessiner. Le métier d’électricien se pratiquait après trois années de mécanique agricole. Heureusement, l’Horticulture m’a épargné la lime, la fraiseuse et l’huile de vidange. Le dessin était terminé. Le premier soir de vie dans le dortoir du Château, on m’avait volé mes feutres. J’ai eu beau pleurnicher l’éducateur, un certain Luis m’a annoncé la couleur : « Ici, c’est la collectivité ! »
A partir de ce moment, les larmes se sont retenues en public à jamais.

1977, j’étais maintenant au ranch. La punkitude transpirait. Sex Pistols, épingle à nourrice faisaient la nique aux anciens gominés rock n’roll qui tentaient de jouer les durs. La révolte avait sonné : No futur ! J’ai commencé à exprimer ma rage par l’écriture.

Quand je serais grand, je serais écrivain.
En attendant, j’étais coincé sous serre à apprendre le métier d’horticulteur. C’est un métier pour calmer le trop plein d’énergie au « caractériel ». Le terme m’amuse. Quoi la société nous reproche d’avoir trop de caractère ? Un comble ! Traduit de nos jours par « sauvageons » ou plus péjorativement de « racaille ». Aucun respect ! Même pour les plantes vertes… Mon sport favori était de me pointer entre deux tablettes de plantes vertes et armé d’un cutter dans chaque main courir pour trancher dans le vif de la chlorophylle.

Un nain de jardin de ma taille m’avait cherché dès le premier jour. J’ai réglé le différent avec un grand coup de râteau dans une vitre à l’intérieur de la serre. Alain C a eut juste le temps de s’écarter de mon massacre. Malgré mon 1m30 à 14 ans, j’étais d’une corpulence trapu. Teigneux par nature, il ne fallait pas me chercher. Le rouquin Fab plus grand d’une tête me provoque à son tour dans le dortoir du château. Je me jette sur lui les poings en avant. Je pousse un rugissement. L’éducateur Robert C nous sépare. Seconde bagarre dans l’atelier de « poterie » avec Fab.

Le géant Vert Christian D, prof de son état me donna l’amour pour les plantes vertes. La première année fut excellente. Je culminais dans les meilleurs de la classe. La passion du métier me coulait comme de la sève. Ça n’a pas duré. J’ai vite compris que si je continuais à ce rythme je rejoignais le rang des « fayots ». J’ai levé le pied de la motivation dès la deuxième année.
Fab devient un super pote. Lui est à l’Hacienda, moi au Ranch. Pendant ce temps là, le Logis noirçi ses pages d’histoires de la délinquance hebdomadaire : cambriolage, vol de voiture, fugue. De mon côté, je donne une image d’ange.

Quand je serais grand, je serais peut-être journaliste…

Je déverse mes premiers écrits sur un cahier d’écolier. Fab est fasciné par l’univers du film Orange Mécanique (Emprunté à la bibliothèque du Logis ?) et son fameux argot des Droogs. Un jour nous vient l’idée d’écrire un journal clandestin ayant pour thème éditorial : les 400 coups de la délinquance aux logis. Complètement excité par le projet on veut s’approcher au plus près de la réalité ambiante. Me voilà à rédiger mon premier article : comment trois équipes de cambrioleurs pénètrent dans le bar-tabac de Saint Lambert des Bois en un week-end ? La fouille en règle des voitures garées sur le parking de l’église pendant la messe du dimanche. La peur panique jusqu’à prendre un gant noir et marron dans une voiture. Le démontage en règle d’un auto-radio à deux minutes de la sortie de l’église de nos fidèles prêcheurs. Le stop pour rentrer au Logis un dimanche soir. Ça marche ! Fred a emprunté une voiture. La virée dans la zone pavillonnaire de Saint Rémy Les Chevreuses après une punition du week-end des éducs.

Nous en étions à notre premier numéro. Un journalisme tout terrain pour témoigner de cette jeunesse insouciante. Mais le tragique fait la « Une ». Gilles R, un type intrépide, fou d’escalade se tue bêtement un week-end au château. Une poule sur un balcon d’un éducateur, ça rend curieux. Gilles grimpe par l’échelle de sécurité. Il va donner à boire à la poule. C’est en redescendant qu’il glisse. Sa tête rebondit sur la rambarde du balcon du dessous. Le logis est sous le choc. On n’a même pas eu le courage d’écrire une nécrologie dans le N°2 de notre journal clandestin. On a préféré se s’aborder en sa mémoire. A partir de ce jour là, je n’ai plus cru en Dieu. J’ai continué à écrire.

Quand je serais grand, je serais écrivain.

Phil Marso, 14 janvier 2007